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Chers amis et bienfaiteurs
Si l’enseignement concerne davantage l’éveil de l’intelligence, la transmission des connaissances, et si l’éducation embrasse la formation de l’être humain dans le domaine moral, on ne peut nier que la nature de l’enseignement délivré dans une école engage aussi l’enfant dans certaines directions, et qu’elle soit porteuse d’influences morales qui le marqueront durablement.
Autrement dit, le professeur qui enseigne est aussi un éducateur. Il l’est par sa personnalité, par l’exemple qu’il donne, par ses conceptions morales qui transparaissent dans ses cours, par sa foi qu’il professe… ou qu’il ne professe pas ! Il l’est par l’autorité qu’il incarne et qu’il assume, mais aussi par la présentation de la discipline qu’il enseigne.
Le professeur de littérature, française ou étrangère, ne peut faire abstraction du climat moral de l’oeuvre qu’il fait étudier. Comme l’écrit le Père Calmel,
« toute oeuvre littéraire un peu grande détient une portée morale par le seul fait que l’être humain dont elle retrace devant nos yeux la destinée est un être moral. (…) Les grands textes littéraires, parce qu’ils évoquent notre condition et les jeux inouïs de notre terrible liberté, nous atteignent aussi dans la sphère morale ; ils nous obligent à porter des jugements de valeur et nous empêchent de nous enfermer dans la seule appréciation esthétique. (1)»
Sans vouloir faire de tout texte un prétexte à un cours de morale, il est impensable, même si l’on doit étudier la dimension esthétique de l’oeuvre, de faire abstraction des grandes questions que l’homme se pose et auxquelles l’oeuvre littéraire étudiée tente de répondre.
Le cours d’histoire n’échappe pas non plus à la règle. Au-delà des renseignements factuels, des dates, de l’usage des témoignages et vestiges du passé, en plus des interprétations possibles, une certaine idée de l’homme social transparaît nécessairement dans le déroulement des faits humains exposés. L’historien ne peut passer sous silence ce qui est juste ou injuste, ce qui relève de la fidélité ou de la trahison des hommes envers leurs concitoyens ou leur patrie, quels principes philosophiques ou religieux animent les institutions de l’Etat étudié, etc.
Quant aux sciences, on peut aisément comprendre que la présentation purement matérielle et physique de leurs contenus butera, à un certain moment, sur les questions philosophiques qu’elles impliquent. S’il est honnête, le professeur de sciences saura reconnaître ses limites en tant que scientifique et prolongera son discours, muni d’une sagesse réaliste, en s’élevant jusqu’au registre philosophique, ou bien y renverra ses élèves. S’il ne l’est pas, il leur donnera l’illusion que la science physique ou naturelle peut se dispenser de la science des sciences qu’est la philosophie, laquelle trouve son aide et sa règle dans les lumières de la Révélation et de la théologie qui en découle. Là où la science de la nature ne peut répondre qu’au «comment» des choses, certains prétendent, à tort, qu’elle peut résoudre tous les «pourquoi». Cette confusion des genres peut être la cause de bien des impasses intellectuelles. L’enseignement des sciences a donc bien une influence d’ordre éducatif.
C’est justement parce que les programmes des disciplines scolaires sont naturellement porteurs d’une certaine conception de l’homme qu’ils doivent faire l’objet de l’attention des parents et des enseignants. Et c’est parce que l’éducation chrétienne se transmet aussi au travers des enseignements qu’il est important de choisir les enseignants en fonction de la conception qu’ils ont de l’homme.
Celle-ci transparaîtra dans leurs cours, leurs commentaires, leurs prises de positions, leurs jugements sur l’actualité, inhérents à tout cours tant soit peu vivant. Cette vie intellectuelle, cette morale au sens large qui découle des cours et de la personnalité du professeur, doivent être vraies, éclairées, formées. C’est pourquoi l’école, l’instruction des enfants mais aussi la formation des maîtres ont toujours constitué un enjeu majeur pour la société temporelle et pour l’Eglise. C’est là que se forgent non seulement l’apprentissage des savoirs mais également l’architecture intellectuelle qui orientera l’esprit et la vie morale du futur adulte. L’école neutre n’existe pas puisque ni les programmes, ni les enseignants ne le sont. Il s’agit donc de choisir la Vérité comme lumière et règle de vie.
OEuvres de l’Église, les écoles catholiques hors contrat, soutenues par la Fraternité Saint- Pie X, se sont fixé cette mission. Elles essaient, avec les moyens qui sont les leurs, de donner aux enfants une formation solide et un sens critique qui les rendent capables de comprendre le monde dans lequel ils vivent. Elles font épanouir la foi catholique que les élèves ont reçue à leur baptême par un enseignement de foi et une éducation à la vertu qui ne font pas abstraction de la crise que l’Eglise traverse depuis un demi-siècle.
Mais cette oeuvre nécessaire et fragile ne peut se faire sans votre aide. Nous la sollicitons avec instance, une nouvelle fois, et nous vous assurons de nos prières reconnaissantes.
Abbé Philippe Bourrat, Directeur de l’enseignement du District de France de la FSSPX
Source : La Porte Latine du 1er novembre 2016
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